Château d’Abbadia, un voyage dans le temps     

21 février 2023

Le château est un monument historique édifié entre 1864 et 1884, dans la commune d’Hendaye nord. Il doit son nom à son propriétaire Antoine d’Abbadie, savant, grand voyageur et défenseur de la culture basque.

Il est tourné vers l’océan et surplombe les falaises escarpées de la Corniche basque. L’architecture de l’édifice est inspirée des châteaux forts du Moyen Âge. Elle harmonise à la perfection le style néogothique et orientalisme. Le château est composé de trois ailes qui partent d’un corps central; chacune à sa fonction particulière. Antoine d’Abbadie souhaitait que cette disposition apporte un maximum d’ensoleillement et une ouverture sur la nature.

La bâtisse est entourée par un immense parc, qui fait partie de la propriété. Cet espace verdoyant a été conçu par le paysagiste Eugène Buhler. Son parc agricole et un jardin paysager offrent un panorama époustouflant sur la côte basque, française et espagnole.

Lieu d’expériences scientifiques

Le château est un observatoire édifié dans le but d’y mener des travaux scientifiques. Il comporte également une partie habitation, adossée à l’observatoire. La partie privée du propriétaire, « l’habitation ses rêves », a été réalisée par le maître d’oeuvre et architecte, Eugène Viollet-le-Duc. La bâtisse reflète la passion pour le style oriental du chercheur.

Sous le porche, on aperçoit quelques mots qui ont été gravés autour d’un trou, qui interpelle. L’ensemble est assez intrigant et donne envie de comprendre la raison de ce phénomène. En effet, Antoine d’Abbadie menait une expérience qui avait pour but de mesurer la déviation de la lumière dans l’atmosphère. Pour cette raison, le scientifique a percé des trous dans le mur du château à plusieurs endroits. Malgré l’expérience qui n’a pas été concluante, il a souhaité graver la phrase qui disait : Ez ikusi, ez ikasi qui signifie : Ne pas voir, ne pas apprendre.

Personnalité hord du commun

Antoine d’Abbadie était un savant hors du commun, né en 1810 à Dublin d’un père basque et d’une mère irlandaise. C’était un passionné de géographie, d’astronomie et de culture orientale. Lorsqu’il était enfant, il rêvait d’explorer le monde d’une manière utile. Il s’est formé à Paris à l’astronomie, géographie, botanique et zoologie. C’était en personnage extrêmement curieux. Une cinquantaine de poèmes disséminés dans le château témoignent de sa passion pour les langues. Il en connaissait 14, dont le guèze et l’amharique.

Il a consacré sa vie à mener des expériences scientifiques. Étant aussi un grand voyageur, il a réalisé la première cartographie d’Éthiopie, le pays où il a vécu onze ans. En 1836, il a publié des Études Grammaticales sur la langue euskarienne. Il s’est beaucoup investi dans la vie des basques et a créé les fêtes euskariennes, qui ont lieu tous les ans, à Urrugne. Il a été élu membre de l’Académie des sciences en 1867 et devenu son président en 1892. À sa mort, en 1897, Antoine d’Abbadie a légué son château à l’Académie des Sciences, qui en est toujours propriétaire.

Visiter le château d’Abbadia

L’architecture et la richesse de la décoration intérieure reflètent la vie hors du commun d’Antoine d’Abbadie. Dès l’entrée dans la bâtisse on pénètre dans un monde irréel. On observe des animaux fantastiques associés au décor éthiopien et des vitraux colorés. Au cœur du château se trouve une grande bibliothèque, qui était un lieu de travail favori d’Antoine. La bibliothèque est composée 10 000 ouvrages, dont 960 ouvrages basques et autres manuscrits, pas moins surprenants. 

Dans la tour sud on découvre une grande pièce circulaire. Elle est entièrement bleue et ornée d’une belle cheminée. Son décor raconte un pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle. Cette chambre d’honneur était reservée aux invités. On y trouve deux inscriptions: la première, placée sur le lit à baldaquin, est en vieux français. L’autre, est inscrite sur le carrelage au fond de la cheminée : « Ne jette point de pierres dans le puits dont tu bois l’eau ».

Comme toutes les propriétés de l’époque, le château possède sa petite chapelle à la décoration de style sicilien et oriental. À l’origine, son grand espace rectangulaire était prévu pour accueillir les fermiers du domaine. Elle est surmontée d’une imposante charpente dont les arcs supportent un plafond en bois. Les murs de la nef portent un monogramme S.A., Saint Antoine le Grand. 

Antoine et Virginie

Le couple d’Abbadie avait une double résidence, ils voyageaient entre Paris et le Pays basque. On associe souvent le château à la personnalité d’Antoine d’Abbadie. Pourtant, son épouse Virginie occupait également ce lieu. Elle était longuement restée dans l’ombre de son mari. Issue de la famille bourgeoise, elle a reçu une éducation à la hauteur de ses origines. C’était une femme à l’esprit vif et l’âme sensible, passionnée du piano. Virginie d’Abbadie s’est beaucoup investie dans la construction du château. Elle supervisait le chantier et a été responsable de nombreux choix décoratifs. Comme toutes les femmes de son époque, elle était chargée d’entretenir des relations sociales et a été souvent félicitée pour son hospitalité. Elle était également une femme d’esprit et gardait une amitié particulière avec écrivain, Pierre Loti. Grâce à leurs multiples escapades sur la corniche basque, elle a réveillé en lui une passion pour le pays basque. En 1897, en guise de reconnaissance, le jeune écrivain lui a dédié son ouvrage Ramuntxo.

Virginie d’Abbadie a été très affectée par le décès de son époux. Néanmoins, elle a conservé son énergie et ses facultés mentales jusqu’à ses 73 ans. Elle est décédée quatre ans après son mari. Tous les deux reposent dans la crypte située sous le choeur de leur chapelle. Elle porte une inscription funéraire : “Ma reconnaissance a porté ma croix”. 


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