Parc Protégé d’Artikutza, Natura 2000

6 mars 2023

Comment résister à la beauté de ce Parc Naturel et ne pas s’y aventurer, une fois de plus. J’ai choisi de faire la randonnée aujourd’hui, malgré la météo peu clémente, la température proche du zéro et beaucoup de vent. Mais qu’importe, cet endroit est exceptionnel même sous la neige. Mon départ s’est fait depuis la maison du garde de la Finca. Ensuite, j’ai emprunté des pentes douces pour entrer dans de superbes forêts de hêtres et de chênes.

La nature et la préhistoire

Le Parc d’Artikutza se trouve en Navarre, dans le sud-est d’Oyartzun. C’est une réserve naturelle de 3 680 hectares, riche d’un long passé historique et préhistorique. On y croise des monuments mégalithiques, de dizaines de cromlechs, dolmens et tumulus où sont déposés les restes humaines, incinérées. Ils portent des noms empruntés de la mythologie basque et se présentent souvent sous l’apparence d’un squelette.

Le Parc est le seul massif du Pays basque entièrement constitué du granite. Dans la masse rocheuse, qui est formée de magma solidifié, se trouvent des filons de divers métaux. Ces sources ont été exploitées déjà à l’époque romaine. Il existe encore des dizaines de puits et galeries minières qui creusent le massif. Il paraît que la longueur totale des grottes et des tunnels atteint 18 km. 

Plate-formes charbonnières

L’itinéraire que j’ai choisi pour ma randonnée est riche en vestiges historiques. On peut y observer de petites plate-formes aplaties. Ce sont des lieux où étaient construites et installées les charbonnières. Elles servaient à faire cuire le bois et obtenir du charbon de bois. Aujourd’hui, le garde forestier privilégie la régénération naturelle de la forêt. Le bois n’est plus brûlé, mais découpé et laissé en place. Ainsi, la décomposition progressive et naturelle permet d’enrichir les sols. De plus, le bois laissé sur place est rapidement occupé par les animaux et leur sert d’habitat et de refuge. Le fait d’écimer les arbres fait partie de la gestion forestière. Elle contribue à favoriser la biodiversité et à revitaliser tous ces beaux forêts.

Les cascades 

Le long du sentier on enjambe des ruisseaux qui se faufilent entre les pins sylvestres. Ils forment des ravines puis, des cascades d’une hauteur et d’une puissance spectaculaires. On ne peut pas s’y approcher, car les falaises sont abruptes et les cascades entourées par la forêt de chênes. On se contente de les prendre en photo, tant que les feuilles ne cachent pas encore ce beau spectacle. En été, on devine leur existence par le bruit de l’eau qui tombe dans le vide, avant de s’écraser sur du granite. Toutes les eaux du Parc Naturel se deversent dans trois rivières: Bidassoa, Oiartzun et Urumea. 

Saviez-vous que la zone protégée appartient à la ville de San Sebastián depuis plus de 100 ans ? En 1901, une épidémie de typhus a ravagé la ville à cause des eaux contaminées qui l’alimentaient. On a décidé de construire de nouvelles sources. Après des longues négociations avec le propriétaire des lieux, la ville a enfin pu acheter le domaine pour 3 200 000 pesetas. Aussitôt, on y a construit des canaux. Puis, un imposant barrage qui alimentait San Sebastián. Aujourd’hui il n’est plus utilisé, car il est remplacé par le barrage d’Anarbe.

La faune et la flore

Il ne faut pas être extrêmement chanceux pour entendre le martèlement des piverts qui percent les vieux troncs. Ils s’alimentent des larves et des insectes qu’ils trouvent dans les écorces. Les trous abandonnés ne restent pas vides longtemps, car la sittelle torchepot les réutilise aussitôt. Elle  rétrécit l’entrée du nid avec de la boue et prend la possession du lieu. Il suffit de lever la tête encore plus haut et observer le majestueux survol des vautours fauves. Ils sont facilement reconnaissables, car ils se déplacent toujours en troupe. On peut les confondre avec l’aigle royal, qui vit également dans cet espace. Contrairement au vautour, l’aigle ne cherche pas de compagnie et survole le parc en solitaire.

En raison de la neige fraîchement tombée cette nuit, la descente vers le village est relativement glissante. Le ciel ne laisse pas la place au soleil. Au-dessus de ma tête je n’ai que des nuages et des flocons de neige qui tombent depuis ce matin. Depuis 8h, je n’ai croisé que trois personnes, dont un garde du parc qui se rendait au hammeau.

Chaque activité effectuée par le garde forestier, respecte le cycle de toutes les espèces. Huit d’entre elles sont particulièrement menacées. Elles portent les noms latins, presque imprononçables : huperzia selago, vandenboschia speciosa, saxifraga clusii, narcissus pseudonarcissus, ruscus aculeatus et soldanella villosa, carpinus betulus et narcissus bulbocodium.

Village d'Artikutza

Pour arriver au village on peut emprunter le sentier de l’ancienne voie de chemin de fer. L’arrivée au village d’Artikutza », dit « abandonné », l’ambiance est très particulière. Le village est enfoui au coeur de la forêt basque avec sa chapelle, le fronton, ses maisons très bien entretenues. Il paraît, qu’il y aurait même un musée écologique, momentanément fermé. Le village a été habité par les ouvriers et leurs familles à l’époque de la construction du barrage. Lorsque les travaux de construction ont été terminés, les villageois ont peu à peu quitté le lieu et partis chercher du travail ailleurs. Aujourd’hui, le quartier d’Artikutza est occupé par le garde forestier, qui entretient le Parc.

Le retour s’est fait par le même chemin. Devant moi il y a environ 3h de montée, jusqu’à la maison de garde. La neige commence à fondre doucement et laisse apparaître les premières végétations, dont les jonquilles. C’est une magnifique carte postale, naturelle. Les piverts ne cessent pas de faire du bruit,  qui s’entremêle avec la vibration des cailloux qui glissent sous mes chaussures. Tout le long du sentier apparaissent, comme par magie, des silhouettes imaginaires. Elles sont bienveillantes, mais leur présence rappelle gentiment que je ne suis pas sur mon territoire.

Artikutza la nuit

On sait très bien que pour observer le ciel et la pluie d’étoiles, il vaut mieux quitter les villes et se rendre dans des zones sans éclairages artificiels. Pour cela, Artikutza est un endroit exceptionnel. Il permet d’apprécier le milieu naturel d’une autre manière. Une telle sortie nocturne demande une préparation particulière et une bonne connaissance du périmètre. Mettez dans votre sac à dos une lampe de poche et des vêtements chauds. Pour des observations nocturnes il existe des sorties organisées et guidées par des professionnels.

Ermitage Saint-Augustin

Chaque année, le 28 août, on fête la journée d’Artikutza. C’est le seul jour de l’année où on peut entrer dans le parc avec son véhicule. Ainsi, on accède  librement au village où se déroulent des festivités. Les habitants des villages avoisinants se rassemblent autour de l’Ermitage Saint-Augustion où est célébrée la traditionnelle messe. Après la prière, les festivités commencent. Le programme comporte des parties de pelote avec des pelotaris locaux, des chants, des danses, de la musique qui retentit poétiquement dans la vallée. La fête se termine par un bal typiquement basque. Quelques visiteurs ou randonneurs qui passent par là sont toujours bienvenus. 

Conseils pratiques pour réussir sa randonnée

Attention, la connexion téléphonique dans le village et sur les sentiers est quasi inexistante. Pour votre sécurité il est préférable de ne pas s’y rendre non accompagné. Le parc peut être exceptionnellement ouvert aux véhicules, avec une autorisation préalable. On peut circuler à vélo sans autorisation, mais uniquement sur les chemins autorisés. La cueillette de châtaignes et de champignons est possible à condition de respecter le quota : 2kg par personne et par jour. En revanche, il est interdit d’extraire ou d’abimer les éléments naturels. Bien évidemment, il est interdit de pêcher et de chasser sur la totalité de la zone protégée. Vous pouvez faire quelques circuits en famille, avec des ados ou des enfants en bas âge.


Consultez le catalogue de circuits organisés, à faire en toute autonomie.